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Rencontre avec Raphaële Marchal de En Rang D’Oignons

Le parcours de Raphaële Marchal est un peu un conte de fée des temps modernes. Lorsqu’elle crée son blog En Rang d’Oignons fin 2014 rien ne la destine à devenir journaliste gastronomique, mais grâce à quelques bonnes rencontres elle fait son chemin jusqu’à créer sa propre entreprise.

Rencontre avec cette « influenceuse culinaire » talentueuse et ambitieuse.

  • Quand on regarde ton profil Facebook ou Instagram, on a l’impression que tu passes ta vie au restaurant. Comment fait-on pour garder la ligne quand on a ton rythme de vie?

Oui, c’est tout à fait vrai pour la partie restaurant!

Tout d’abord, je ne me trouve pas particulièrement mince et je n’ai jamais accordé d’importance au poids. Je n’ai pas de complexes et les poignées d’amour font parties du job. J’ai 26 ans donc je perds facilement, c’est sur qu’à 45 ans se sera moins le cas.

J’ai aussi pris une certaine distance face à l’alimentation. J’ai beaucoup moins de pulsion et de crises de goinfrage l’après-midi comme je pouvais avoir avant du au stress. Je travaillai dans l’événementiel, dans un bureau, avec du stress et peu d’activité physique. Alors que maintenant je vais à beaucoup de rendez-vous à pieds et je ne grignote jamais l’après-midi. Je me suis mise à faire de l’aquabike, même si ça fait rire mes amis car je n’y vais pas souvent.

J’ai un rapport avec l’alimentation plus sain depuis que je bosse là dedans. Je mange beaucoup moins sucré, surtout après la rédaction du livre pour lequel j’ai fait un coma de sucre.

J’aime toujours bien un petit grignotage devant un film et j’ai une vraie passion pour les chips et les bonbons. J’ai un pot de bonbons chez moi, je dis que c’est pour les invités mais je pioche dedans régulièrement.

J’ai aussi de la chance d’avoir grandi dans une famille de fruits et légumes. Mon grand-père travaillait dans le transport des fruits et légumes donc on en a toujours beaucoup mangé. Plus jeune, je mangeai du céleri au goûter.

J’ai rapidement été touchée par la cuisine. Surtout par l’émission « Oui, chef » avec Cyril Lignac. Je devais avoir 10 ans à l’époque et je regardais cette émission le soir en pyjama. C’est ma madeleine de Proust. Je trouvai formidable la démarche de cette émission. Cela m’a fait avoir une prise de conscience à la cantine.

Je me rappelle une fois être rentrée à la maison en demandant à mes parents si j’étais bête car une de mes camarades, à la cantine, avait pris une assiette de calamars frits dont elle n’avait mangé que la panure et pas les calamars, en me disant qu’elle adorait les calamars. Je ne comprenais pas et j’avais l’impression que c’était moi qui était bizarre.

A présent, dans mon quotidien, je mange des choses rapides comme du quinoa en sachet, ça me permet de manger sainement et rapidement. Quand j’ai eu une grosse journée, il m’arrive de manger seulement un melon le soir.

Pour mes courses, je vais souvent à l’épicerie fine Papa Sapiens ou chez Kilikio, une épicerie grecque, où j’achète plein de petites choses surtout pour les apéros entre amis. Je passe aussi souvent acheté des gougères chez Pain-Pain ou des madeleines chez Gilles Marchal. Ca ne m’empêche pas d’aller à Monoprix acheter un pack de bières.

Il n’y a que la viande et le poisson que je n’achète jamais au supermarché, mais que je prends chez des petits producteurs.

Mes amis d’ailleurs ne sont pas de ce milieu, je ne peux donc pas leur imposer de faire leurs courses à tel ou tel endroit. D’ailleurs ça me fait du bien et ça me permet de garder un équilibre.

  • J’ai lu que tu aurais aimé faire une école hôtelière. Cuisines-tu chez toi? 

J’ai fait plusieurs stages en restaurant car je voulais être cuisinière. Et finalement je me suis rendue compte que je rencontrais des personnes avec des histoires passionnantes et que je préférais écrire des histoires que de cuisiner. Je laisse le soin aux chefs de cuisiner et de nous épater.

Avant je cuisinais beaucoup. Quand je recevais des amis, je cuisinais pendant 4 jours, je réfléchissais aux détails de la table,… J’ai même participé à l’émission « Un diner presque parfait » que j’ai gagné ex-aequo. J’avais fait un risotto aux petits-pois, du riz de veau et des langoustines, une tarte aux fraises déstructurée.

A un moment, j’organisai aussi des cocktails dinatoires chez des gens, souvent grâce au baby-sitting que je faisais à l’époque. Je mettais une semaine à tout préparer.

Aujourd’hui, je ne cuisine plus mais ça ne me manque pas. Je m’amuse beaucoup plus à faire plein de courses.

Par contre, dans mon métier, ça aide de connaitre la cuisine, donc je ne regrette pas mes choix.

  • As-tu quand même quelques recettes fétiches?

J’ai une recette qui vient de ma maman. Elle nous fait souvent un plat qu’elle appelle « frichti ». Ce mot me faisait beaucoup rire quand j’étais petite. C‘était un genre de tajine de poulet avec des pruneaux, des amandes et des oignons, qui mijote longtemps avec de la pâte de curry. Elle nous le sert avec pâtes, ce que je fais toujours quand j’en prépare moi-même.

Il y a une recette que j’aime bien, que j’ai piqué au restaurant Caius. C’est du fenouil tranché à la mandoline, avec des abricots secs, des pistaches, du miel et de la sauce soja.

Côté sucré, c’est une recette de ma cousine Manon, un cake aux poires, amandes et chocolat au lait.

  • Tu parlais il n’y a pas longtemps du livre « Manger et cuisiner éco-responsable » de François Pasteau. Penses-tu que c’est le rôle des chefs de parler d’écologie? As-tu l’impression que c’est un sujet qui touche les chefs?

François est un grand défenseur de cette cause.

Je pense que quand ça vient des chefs, le message passent mieux. C’est grâce à eux que l’on a découvert des producteurs car ils ont mis les noms sur les cartes des restaurants.

Camille Labro a également écrit un livre, « Fourche et fourchette », dans lequel elle a réalisée des portraits de paysans.

Ensuite, c’est aux chefs de jouer les messagers.

J’ai une anecdote d’un repas à Saint Raphael, chez Terre Blanche, un super resto. Ils nous servent un plat en mettant en avant les premières tomates, or nous n’étions pas dans la saison des tomates. Je dis ça aux personnes qui étaient avec moi à table, elles ont été étonnées d’apprendre qu’il y avait une saison pour les tomates car on en trouve toute l’année en supermarché. Je me suis dit que si ces personnes n’étaient pas au courant, c’est qu’il y avait encore beaucoup de travail. Ca me chagrine. C’est la dessus que les chefs et pâtissiers doivent jouer et éduquer. Il faut se dire que si il n’y avait de tomates en dehors des saisons, ça changerai le monde et la planète irait déjà mieux.

  • Penses-tu que c’est le rôle des journalistes culinaires de parler de nutrition et de santé?

C’est mon rôle de parler de respect des gens qui travaillent dur, des vignerons, des fromagers,… Manger de bons produits c’est bon pour la santé et pour la ligne. Je crois vraiment au bon beurre et au bon pain qui font du bien. Je n’encourage personne à faire des régimes.

Mon rôle est de parler de produits sains, comme pour les vins sans souffre et sans sulfate. Je ne bois plus que des vins natures.

Il est important d’avoir un produit fait avec amour.

C’est sur que ce n’est pas forcément le même prix de manger de la bonne viande par exemple, mais quand on va chez un super boucher comme « Ah la vache », je suis touchée par son histoire et ça change tout.

Tous ces producteurs méritent de vivre mieux. J’ai rencontré des vignerons qui n’ont même pas les moyens de boire leur propre vin. Mais ces personnes sont tellement passionnées qu’elles n’abandonnent pas.

Je pense aussi qu’il est possible de bien manger avec un budget moyen. On a de la chance à Paris d’avoir des produits extraordinaires. Je suis énervée de voir les gens achetés des produits tout prêts fait avec des merdes dedans.

Eduquer les gens demande beaucoup de travail. Ce sont les chefs qui le font tout le boulot en cuisine.

C’est mon rôle et celui des chefs d’amorcer la démarche.

  • Depuis quelques années, tu travailles au contact des chefs. As-tu l’impression que les mentalités changent en cuisine? Les chefs font-ils plus attention à l’équilibre alimentaire par exemple?

Oui, cela fait environ 10 ans que j’évolue dans ce milieu, d’abord en faisant des stages, puis en travaillant dans l’événementiel et en étant à mon compte depuis 2 ans.

En effet, les chefs font de plus en plus attention. On mange plus léger au restaurant.

Par exemple, j’ai récemment dîné avec mon ami David Bénichou, chez Vivant, mon resto préféré en ce moment. On s’est partagé 4/5 entrées et on a mangé un plat de pâtes chacun. Avec tout ça, j’avais faim ce matin!

Je pense qu’il ai plus simple de manger sainement au restaurant car on trouve beaucoup de légumes ou encore du poisson cru.

  • Que penserais-tu d’un label sur la nutrition dans les restaurants?

Je détesterai! Cela gâcherait le plaisir. Et puis, les calories c’est absurde car il ne s’agit pas de manger 2000 calories mais de manger des bonnes choses, de saison, faites par des « vrais gens ». Ca incite les ados à se mettre au régime et ça entraine des dérives. C’est comme la loi sur les allergènes, c’est totalement con. Je trouve ça ridicule car les chefs indiquent tous les allergènes sur leur carte même si les plats n’en contiennent pas, juste pour se protéger.

A moins que ce ne soit le concept. Par exemple, chez Cojean, qui est correct pour de la restauration rapide, c’est moins dérangeant qu’il y ai les informations nutritionnelles.

  • Quelles sont tes adresses de cuisine « saine » préférées à Paris?

J’aime beaucoup So Nat, à côté de Notre-Dame de Lorette. C’est un petit resto trop bon, végétarien, super light mais qui permet de tenir.

Il y a aussi la Guinguette d’Angèle. Je trouve ça vraiment délicieux. Il y a toujours beaucoup de goût et c’est très sain. Ce que j’aime chez Angèle, c’est que c’est une énorme épicurienne. Même si elle prône une cuisine saine, elle sait se faire plaisir.

Comme dernière adresse je pense à Maison Plisson. Ce n’est pas que de la cuisine saine mais on retrouve beaucoup de légumes. Il y a une très bonne salade avec du quinoa et plein de graines. Tout dépend de ce que tu choisis.

  • Et tes adresses les plus gourmandes?

Il y a Les Arlots que j’adore. Vivant, Tempéro dans le 13ème, le Baratin. L’ami Jean, bien sur.

  • En effet, on te voit souvent chez L’ami Jean. Tu as l’air d’avoir une relation particulière avec cet endroit.

Oui, je connais Stéphane Jego depuis longtemps. C’est un peu mon papa dans le métier. C’est la personne la plus bienveillante, aimante, passionnée et talentueuse que je connaisse. C’est un mec brillant qui apporte beaucoup dans le métier.

C’est un ami anglais qui m’a fait découvrir ce restaurant quand j’avais 19 ans. J’y ai fêté les anniversaires de En Rang d’Oignons.

J’y ai même rencontré Bradley Cooper, qui y vient souvent. Je me suis retrouvé à servir les plats de sa table et à finir le repas, après quelques verres de vin, en partageant du riz au lait avec lui à sa table.

 

  • Faisons un petit point sur ton parcours. Tu es journaliste gastronomique, auteur mais tu as aussi une société d’événementiel, n’est ce pas?

Oui c’est ça. j’ai lancé un premier événement le 16 mars 2015, quelques mois après la création de mon blog, qui s’appelait « Quand les chefs pêchent mignon ».J’ai créé cet événement avec ce que j’avais appris dans mon travail. J’ai écrit à trente chefs, sans penser qu’ils viendraient, en leur demandant d’apporter 50 exemplaires de leur pécher mignon.

J’ai loué un appartement dans le 3ème arrondissement, mes copines sont venues faire le service. Et j’ai vu arriver les chefs avec leurs réalisations.

Guillaume Sanchez adore les langues acidulés, ces bonbons de toutes les couleurs. Il a ramené 50 langues acidulées faites maison. A 23 ans, c’était déjà un génie!

C’était incroyable, c’est ça qui m’a permis de me lancer.

Ensuite je suis devenue enquêtrice pour le Fooding, puis rédactrice pour Fou de pâtisserie et Fou de cuisine. 

Quand j’ai eu ma première page, j’ai ressentie une grande fierté.

En créant ma société, j’ai divisé mon salaire par deux mais je n’ai jamais été aussi heureuse que maintenant.

C’est grâce à des rencontres telles que Julie Matthieu et Muriel Tallandier que j’ai pu évoluer de cette façon.

 

 

  • Quels sont tes futurs projets?

 

Toujours des évènements avec les chefs pour des clients extérieurs et le 19 juin, je fête les trois ans de En Rang d’Oignons chez Maison Maison. C’est vraiment mon évènement chouchou. Il me permet de rassembler famille, amis, chefs, journalistes,…

Je compte aussi réaliser plus de vidéos d’immersion avec Super Bon et Minute Buzz. Récemment j’ai rencontré Nicolas Haelewyn et Jean-François Piège pour ces vidéos.

Je suis également enseignante de communication. C’est marrant car j’ai des élèves qui ont mon âge et je ne peux pas les empêcher de me suivre sur les réseaux sociaux.

Depuis que je suis à mon compte, je suis très libre dans mon boulot, je m’organise comme je veux. J’aime beaucoup cette liberté.

Même si je travaille beaucoup, je garde du temps pour ma famille et mes amis, c’est important.

Encore merci à Raphaële Marchal pour le temps passé ensemble et pour ce bel échange.

 

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