Non classé

Rencontre culinaire avec Mickael Braure

Après avoir travaillé plusieurs années au restaurant La Royale à Lille, Mickael Braure a posé ses couteaux au restaurant L’Infini sur le golf d’Arras depuis quelques mois. Rencontre avec un chef audacieux et ambitieux.

Tout d’abord, merci de nous recevoir dans ce très beau cadre, ça change du restaurant La Royale, en plein cœur de Lille, où tu travaillais avant. Pourquoi ce changement d’ailleurs?

Je suis arrivé à La Royale à 22 ans, j’avais envie d’un nouveau challenge. Là-bas, j’étais seul en cuisine alors qu’ici je gère une équipe de 10 gars. Je l’ai surtout fait pour le challenge et l’envie de faire du plus gros volume.

En effet, c’est un sacré changement. Combien de couverts faites-vous et comment fonctionne la carte?

On peut faire jusqu’à 300 couverts.

J’ai gardé la carte du golfeur car il ne faut pas oublier que l’on est sur un golf et que l’on a une partie de la clientèle qui est sportive. Cette carte est composée de 6 plats légers et permet de déjeuner rapidement tout en étant pas lourd pour retourner jouer.

A côté de ça, on a une seule carte qui allie simplicité et gastronomie.

Le restaurant a connu un changement de clientèle: certains clients reviennent, certains sont partis mais on a aussi de nouveaux clients.

Dans un futur proche, on va continuer de se développer et à faire du plus gros volume.

Est-ce que l’on retrouve le cochon que tu travaillais beaucoup à La Royale?

En effet, j’ai un vrai amour pour le cochon. Tout à commencer avec ma rencontre avec Gregory Delassus, producteur de cochon. Il est venu me faire goûter des échantillons et quand j’ai vu ses mains, des mains de travailleur encore sales et terreuses, je me suis dit qu’il fallait que je travaille avec lui.

Le cochon c’est un produit très gourmand, pas cher et dans lequel on peut tout utiliser. Même les oreilles, c’est un délice!

A L’Infini, je travaille moins le cochon mais je me fournis toujours chez Gregory pour le bœuf et le porc. Je connais sa qualité et ce sont des produits bio.

C’est important pour toi d’avoir des produits bio?

Oui, j’utilise du bio au maximum. Du local et du court circuit aussi. L’avantage du bio c’est que se sont des produits de saison. C’est mieux au niveau économique et c’est meilleur pour la santé.

Tout comme le cochon est aussi un produit de saison. Je pense qu’il faut manger de la viande de façon raisonnée. On n’a pas besoin de manger 300g de viande à un repas. Je ne mets pas de grosse pièce de viande à la carte alors que c’était le cas avant. Je n’ai pas envie de surconsommer la viande.

Tu as donc apporté de gros changements à la carte. Cela n’a pas été trop dur pour l’équipe et pour les clients?

J’ai changé toute l’équipe donc il n’y a pas de souci à ce niveau.

Par contre tous les clients ne comprennent pas. Il y a toujours des clients qui veulent leur morceau de viande. Si un client est insistant, je peux le faire, mais faire griller un morceau de viande, ce n’est pas ce qui m’intéresse.

On parle beaucoup de viande mais observes-tu une demande de plats végétariens?

Oui, il y a une grosse demande, de plus en plus importante. On me demande de beaux produits: des asperges, de la truffe, des fruits de mer… C’était moins le cas à La Royale où j’étais connu pour la viande.

J’ai envie de mettre un plat végétarien à la carte. Une déclinaison autour d’un produit. Un légume déstructuré et cuisiné de différentes façons.

Au début, on ne cuisine pas trop les légumes, mais en fait c’est magnifique, ça se travaille de plein de façon. Par exemple avec l’artichaut je m’éclate. Les autres me prennent pour un fou quand je leur dis que l’on va travailler des légumes, qu’il ne faut pas éplucher une carotte car c’est dans la peau que se trouvent les vitamines. Une fois j’ai cuit un chou-fleur entier au four. Il avait un aspect brûlé à la sortie mais ça faisait un super effet à table!

Et des demandes sans gluten ou sans lactose par exemple, tu en as?

Il y en a de plus en plus aussi. Je pense qu’il y a de plus en plus de régimes et de problèmes de santé à cause de la malbouffe qui est trop développée.

On sait s’adapter à ce genre de régime mais dans l’idéal, je préfère que les clients appellent pour prévenir.

Fais-tu attention à l’équilibre de tes plats?

Je fais attention à l’équilibre gustatif, qu’il y ait du goût, de la saveur, et à l’équilibre au niveau des quantités. Par exemple quand je cuisine du cochon, qui est un produit gras, je fais attention aux accompagnements que je vais choisir.

Généralement je mets peu de féculents ou bien sous une forme travaillée telle une chips.

Pour ce qui est de la pâtisserie j’ai un chef pâtissier, Aurélien. C’est un métier à part entière. Je lui donne des directives et les produits que j’ai envie de voir à la carte puis je le laisse créer. Je fais évidemment attention à l’équilibre du menu et à la cohérence.

Tu m’as parlé de l’importance du bio et du local, des produits de Gregory Delassus. D’où viennent les autres produits que tu utilises? 

Les fruits et légumes viennent de Beaurains et du Leclerc au MIN de Lomme.

Nous avons aussi nos propres produits. Je fais pousser des fruits rouges et des plantes aromatiques. C’est moi qui ai créé ce petit potager. C’est le rêve de tout cuisinier! Nous avons aussi des pommes et des poires ce qui nous permet d’avoir un du jus de pomme maison.

Quand tu crées un plat à quoi fais-tu le plus attention? Y a-t-il un nombre d’éléments particulier qui compose ton assiette?

Je peux mettre plusieurs produits ensemble à condition qu’ils soient plutôt neutres. Il n’y a pas de limites.

J’utilise beaucoup d’herbes et de salades.

Généralement, une assiette est composée d’un produit de base (viande ou poisson), d’une sauce et d’herbes. C’est comme une phrase avec sujet, verbe et complément.

Quelles sont tes inspirations, les chefs que tu admires?

Je n’ai pas de chef en particulier. J’essaie de ne pas reproduire ce que font les copains. Bien sûr si il y a un effet de mode, comme par exemple faire un dressage sur le bord de l’assiette, je le ferai. Mais sinon, je m’inspire de tout: quand je vais chercher mes produits, une conversation, une rencontre,…

Tu parles d’effet de mode, fais-tu attention aux tendances culinaires?

Oui, ça reste une mode. Il faut rester dans l’air du temps. Il y a eu la mode de la fumaison, en ce moment c’est beaucoup les légumes au barbecue.

Que penserais-tu d’un label avec les informations nutritionnelles des plats dans les restaurants?

Ce serait trop de travail pour moi mais ça pourrait être sympa. Cela pourrait être un label concernant la nutrition qui montrerait que l’on fait attention à l’aspect nutritionnel. Un peu comme le label « fait maison ».

Pour toi, l’aspect nutritionnel est-il important?

Oui, il est important de garder la valeur énergétique et de respecter le produit. Surtout quand on a la chance de travailler des produits de qualité. Je pense que c’est grâce à la relation avec les producteurs que les cuisiniers se rendent compte de cela.

Est-ce que justement tu penses que c’est le rôle d’un chef de parler de santé et de nutrition?

Oui mais est-ce la personne la mieux informée? Au début d’une carrière de cuisinier on ne s’y intéresse pas, on s’y intéresse par la suite quand on a plus de temps et que l’on évolue.

La santé et la nutrition font partis du bien manger.

Les jeunes générations de cuisiniers font-elles plus attention à l’aspect nutritionnel? Les méthodes d’apprentissage vont-elles changer?

Non, rien ne change, on aime le bon goût d’avant. Je continuerai à utiliser mon beurre demi-sel mais je pense qu’il faut manger de façon raisonnée.

Je fais de l’éducation en cuisine avec mes gars. Je leur présente de nouveaux produits, je leur explique pourquoi on épluche pas certains légumes. Il ne faut pas avoir peur, il faut avoir envie de tester et oser de nouvelles choses.

Dernière question, plus personnelle: fais-tu attention à ton alimentation en dehors du restaurant?

Comme on dit, c’est le cordonnier le plus mal chaussé!

Avec mon changement de travail et la reprise du restaurant j’ai pris du poids donc je fais beaucoup d’efforts. Cependant, on a des horaires compliqués, on mange des choses pas très bonnes pour pouvoir tenir le rythme et c’est un milieu dans lequel on fait beaucoup la fête.

Généralement on mange avant le service, à 11h30 et 18h30. Parfois on ne mange pas avec les gars, puis on se fait des frites à 2 heures du matin car on a faim.

Chez moi, je cuisine un peu. Je ne fais pas de grande gastronomie, mais je mange sainement et on mange généralement beaucoup de légumes.

    

La recette de Mickael Braure: Tartare de bœuf à l’encre de seiche

Je travaille un bœuf High Land qui est une viande très goûteuse et pas grasse, taillée dans le filet. Ce bœuf vient de l’Avesnois. Il est bio et élevé en plein air.

Je coupe le bœuf au couteau. J’ajoute de l’huile d’olive, du sel et du poivre de Penja qui provient des Epicentriques à Lille.

J’ajoute une cuillère à café d’encre de sèche qui va apporter un goût iodé. Je zeste un demi citron vert et je râpe un morceau de gingembre.

Sur l’extérieur du tartare, j’apporte du croquant avec de l’oignon cébette, de l’échalote. J’ajoute des champignons Enoki, des fleurs de bourraches du jardin, des fleurs d’ail des ours et des mourons des oiseaux.

Pour rappeler le côté iodé, je parsème de poudre d’algue.

Je viens disposer une chips de feuille de riz, obtenue avec du riz trop cuit que l’on réduit en poudre, que l’on fait sécher au four, puis que l’on frit. Il est possible d’obtenir une chips de riz avec une feuille de riz du commerce que l’on fait frire.

C’est une recette qui est servie en entrée et que vous pouvez retrouver actuellement à la carte du restaurant L’infini.

      

Je tiens à remercier Mickael Braure pour son accueil, ainsi que toute l’équipe du restaurant L’infini et bien surElise pour ses belles photos.

L’infini 

Rue Briquet Taillander

62223 Anzin-Saint-Aubin 

Une réflexion au sujet de « Rencontre culinaire avec Mickael Braure »

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *